Titre

Le Phénix

Auteur Abdallah Chabani  
Éditeur autoédition  
Année date inconnue
Joueurs 2
Public enfants, ados, adultes
Durée 45 min
Caractéristiques non vu ailleurs, outrecuidant, pièce de musée
Mécanisme mots et lettres
Thèmes animaux, animaux fantastiques, fantastique
Emplacement archives P
Règle du jeu
Ressource


Critique du livre sur
El Watan
                 

Le Phénix est un jeu dans lequel il s'agit de former des mots sur une grille à l'aide de petites tuiles représentant des lettres. « Rien de bien original », me direz-vous. Si, un peu quand même…

Le Phénix se pratique à deux, les joueurs se faisant face. Au départ, on tire des lettres au hasard pour former la ligne au centre du tablier. À tour de rôle, chacun écrit un mot sur la grille selon son propre sens de lecture, et en s'appuyant uniquement sur les lettres de sa couleur. Comme dans la plupart des jeux de mots croisés, il existe trois façons de poser un nouveau mot :

  • perpendiculairement à un mot déjà posé, en réutilisant une de ses lettres ;
  • perpendiculairement à un mot déjà posé, en allongeant celui-ci par l'une de ses extrémités ;
  • parallèlement à un ou plusieurs mots déjà posés, en créant des « maçonneries ».

On gagne des points pour tous les mots créés ou allongés, à raison d'un point par lettre composant ces mots.

Puisque l'adversaire pose lui aussi des tuiles, la grille va devenir peu à peu encombrée. Mais il est possible - c'est même l'originalité du jeu - d'attaquer les mots adverses. Il suffit pour cela de créer un mot qui chevauche un ou plusieurs mots adverses, sans se préoccuper de leur couleur. Lorsque cela se produit, on retire toutes les lettres des mots adverses chevauchés. Elles deviennent « prisonnières », et feront gagner des points en fin de la partie.

Il est donc important de créer des mots à l'abri des attaques, en évitant, par exemple, de les construire à proximité immédiate de lettres usuelles. On imagine facilement qu'un mot placé à côté d'un W adverse est plus en sécurité qu'à côté d'un E, d'un S ou d'un A.

Un jeu (et un auteur) à l'histoire mouvementée

Le Phénix est indéniablement intéressant. Pour autant, ses principes fondateurs ne sont guère innovants et le croisement de mots sur une grille est un mécanisme déjà utilisé par plusieurs centaines de jeux… En revanche, la capture d'un mot chevauché est plutôt originale. À ma connaissance, peu de titres utilisent cette idée, mais elle ne suffit pas à conférer au jeu un caractère véritablement novateur.

Malheureusement, l'auteur s'est mis en tête que Le Phénix était révolutionnaire. Plus grave, il s'est persuadé qu'il avait été copié, et que cela expliquait le peu de succès commercial de sa création.

Il a donc décidé d'attaquer en justice l'auteur de Takemo, l'accusant de plagiat. Le lecteur pourra facilement constater, en lisant les deux règles, qu'elles sont très différentes. La seule idée commune est la capture des mots adverses par chevauchement. Mais les différences sont considérables : taille de la grille, position de départ, valeur des mots, objectif, lettres capturées rapportant ou non des points, obligation ou non que la lettre chevauchant soit identique à celle chevauchée, etc.

Cela n'a pas empêché Abdallah Chabani d'attaquer Yves Lesclavec au tribunal correctionnel, en appel, en cassation et enfin à la Cour européenne des droits de l’homme. Bien évidemment, il a perdu devant chacune de ces instances. Il a alors transformé son combat juridique en combat politique, pensant que sa nationalité algérienne était à l'origine de tous ses malheurs. Il a ainsi publié en 2010 un ouvrage où il décrit ses déboires, sous le titre incroyable de : « J'ai créé le jeu de lettres et de stratégie le plus intéressant au monde - Ses heurts et malheurs - Sa spoliation légalisée en France ».

Bien évidemment, il a remporté facilement l'adhésion de quelques personnes mettant tous les malheurs du monde sur le compte du « grand complot international visant à spolier les créateurs issus du tiers-monde ». L'article d'El Watan, critiquant intelligemment le livre, me semble faire la part des choses. Je vous en conseille la lecture (voir lien plus bas).

Je ne connais pas personnellement M. Abdallah Chabani. Tous mes amis qui l'ont rencontré me parlent d'un homme extrêmement cultivé, mais malheureusement obnubilé par l'idée qu'on lui aurait volé sa création.

Un auteur persuadé d'avoir créé « le jeu du siècle », on en rencontre souvent ! Mais à ce point, je crois que c'est du jamais-vu. C'est d'autant plus dommage que Le Phénix est réellement intéressant.  

Ne pas confondre…

                 

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François Haffner
7 novembre 2010